Discours de Eric Simard au Centre Culturel Tjibaou

Voici le discours d’Éric Simard, notre lauréat 2012, au Centre Culturel Tjibaou le mercredi 24 octobre.

Je voudrais tout d’abord remercier ceux qui permettent au Prix « Livre mon ami » d’exister. L’association « Livre mon ami » et tous les partenaires éducatifs et financiers. Merci à Marie-Laure, Nicole, Pierre, Armelle, Brigitte, Bernard, Evelyne et tous ceux qui œuvrent pour que mon séjour soit le plus réussi possible. Merci également à la Maison du Livre qui m’a accueilli entre ses murs.
On dit « découvrir une île » mais en réalité, c’est l’île qui nous « découvre » en retirant une à une les « vieilles croutes et les vieilles peaux » que nous avons accumulées sur le continent. Je suis sur votre île depuis quelques jours… et je me sens déjà étrangement neuf. Le charme de la Nouvelle Calédonie a opéré sur moi. J’y ai croisé des regards intenses, des sourires rares, j’ai entendu « claquer le langage ». Surtout, de Nouméa à l’île de Maré, de Yaté à la Province nord, j’ai été touché par une évidence : guidés par leurs enseignants, les enfants parviennent à se respecter, à vivre ensemble, à s’étonner en écoutant son camarade de couleur de peau et de culture différente. J’ai vu dans une même classe des jeunes d’origine mélanésienne, européenne, polynésienne, asiatique, approuver les valeurs contenues dans le livre « L’enfaon », à savoir le respect de l’autre dans sa différence. Et moi qui suis socialement d’un naturel plutôt pessimiste, j’avoue que ces observations m’ont redonné espoir. En préparant ma venue, les enseignants et les documentalistes ont stimulé la créativité des enfants et je les en remercie du fond du cœur. Voici quelques exemples :
Au collège Tuband, les élèves ont créé des chimères en salle de biologie. Au collège Normandie, tout l’établissement a été génétiquement modifié. Le principal avait des ailes, la secrétaire avait trois bras. J’ai failli ouvrir une trousse à baffes inventée par un élève. A Katiramona, un garçon a réalisé une vidéo et a fait vivre sous mes yeux ébahi L’enfaon. Au collège James Cook, j’ai pu constater que certains de mes livres avaient déjà « embarqué » les lecteurs sur une autre île : l’Irlande. Les jeunes de Mariotti m’ont fait découvrir la faune marine de leur lagon sur l’île aux canards. Ceux de l’école Dupond m’ont présenté le fabuleux Grand Aquarium de Nouméa. A l’école Trouillot, j’ai découvert un nouveau chapitre de L’enfaon. A l’école Higginson de Dumbéa, nous avons convenu que « Blanc sans « n », ça fait « Blac », comme quoi sans « haine », nous sommes tous des frères et sœurs ». Dans les deux collèges de Bourail, les élèves ont mis l’accent sur la fraternité et la tolérance. J’ai trouvé les lettres de bienvenue des élèves de Houailou sur la plage du Bonhomme et le vent a emporté nos paroles de partage. A La Foa, les lecteurs ont joué leurs scènes préférées du roman. A Yaté, ils ont mis en chanson un de mes poèmes. A Yaoué, ils se sont cachés derrière des masques de chimères. Sur l’île de Maré, ils m’ont lu et offert leurs propres poèmes, ainsi qu’un magnifique tableau de L’enfaon composé à partir du sable de l’île.
Et pour finir, parce que les enfants donnent tout et plus que tout, voici ce que m’a dit un garçon à l’instant où je quittais sa classe. Il a dû sentir que j’étais un peu triste de partir, parce qu’il m’a lancé :
« Monsieur, ne t’inquiète pas ! Si un jour tu as un autre livre de sélectionné, je voterai pour toi ! »

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